« Vous voilà donc enfin ? Partis dès ce matin,
A peine êtes-vous là ? Quel naturel lambin ! »
« Allons, dit l’escargot, ne vous alarmez point
Si nous arrivons tard, et dans un grand besoin !
Offrez plutôt secours et saluez ce preux,
Que seules la bonté et la douceur des Dieux
Vous convoient à mon dos pour consulter vos cartes,
Dont les pouvoirs, dit-on, l’obscurité écartent »
« Avancez donc un peu, que je vois cet enfant,
Pour qui même les dieux ont sonné l’olifant ! »
Marchant timidement, le Prince osa un pas
Vers la femme en haillon, qui caressait un chat.
« Quel honneur me vaut-il d’être votre prêtresse ? »
Ajouta la Pythie au regard de tigresse.
« La sagesse des mots et celle des devins
Eclairent bien souvent les plus obscurs destins.
Ainsi votre savoir me sera salutaire
Pour trouver ce bonheur qui a chacun doit plaire.»
« Tirez de ce paquet, dit la cartomancienne,
Trois lames au hasard que votre vie contienne. »
Le Prince malchanceux découvrit l’as de cœur,
Le beau roi de carreau puis son valet d’honneur.
La prophétie advint comme un coup de tonnerre !
« Vous errerez longtemps et par toute la terre,
Avant de revenir près de votre palais,
Où l’on aura caché des trésors sous un dais.
Sans que vous le sachiez, on cherche à vous berner.
Méfiez-vous des gens qui veulent vous donner
Et des plumes de jais et un conseil gratuit.
Ils trompent tous vos vœux et vous auront séduit.
Tout homme qui se perd dans le monde des sots,
Sera foin pour les vers et leurs chers vermisseaux.
Apprenez cependant que l’oracle a un prix,
Et donnez-moi tantôt neuf florins ou bien dix. »
Tirant deux pièces d’or de ces chausses de lin,
L’enfant solda son dû puis disparut chagrin.
à suivre...